8 novembre 2022

RE2020 : explications avec Marie-Claude Bassette-Renault, directrice construction SMABTP

La RE 2020 instaure une feuille de route ambitieuse pour la France pour lutter contre le dérèglement climatique. Elle repose sur une transformation progressive des techniques de construction, des filières industrielles et des solutions énergétiques. Retour sur ses enjeux, opportunités et solutions avec Marie-Claude Bassette-Renault, directrice construction SMABTP.

Lors du salon Batimat en octobre dernier, au Parc des expositions de la Porte de Versailles à Paris, Batiradio, pour son émission « La tribune des solutions », a interrogé trois experts de SMABTP – Alexandre Kulinicz, directeur technique IARD, Marie-Claude Bassette-Renault, directrice construction et Clément Jaffrelo, chargé de missions pour Socabat – sur le thème de la RE2020 : Quels risques et responsabilités pour les constructeurs ?

Retour sur les enjeux de cette nouvelle réglementation environnementale pour le secteur de la construction et pour SMABTP, avec Marie-Claude Bassette-Renault, directrice construction.

Pouvez-vous nous rappeler les raisons de la mise en place de la RE2020 ainsi que ses caractéristiques et objectifs ?

Marie-Claude Bassette-Renault : Canicules, incendies, sécheresses, inondations, tempêtes, grêle, sont des marqueurs visibles du dérèglement climatique conduisant les pays, à l’échelle mondiale, à agir pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre. La France ne fait pas exception et pour lutter contre le réchauffement climatique, elle s’est engagée, secteur par secteur, dans la Stratégie Nationale Bas Carbone (SNBC), avec l’objectif d’atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050.

En France, le secteur du bâtiment est particulièrement concerné puisqu’il représente à peu près le tiers des émissions de CO2 (usage des bâtiments et activité de construction).

Pour réduire l’impact carbone des bâtiments neufs aussi bien dès leur conception et construction que pendant toute leur durée de vie c’est-à-dire sur l’ensemble de leur cycle de vie, les pouvoirs publics ont mis en place la Réglementation Environnementale 2020 (RE2020), entrée en vigueur le 1er janvier 2022. Depuis cette date, les permis de construire déposés pour les maisons individuelles et les logements collectifs y sont soumis.

La RE2020 est, depuis le 1er juillet 2022, étendue aux bureaux et bâtiments scolaires et, à partir du 1er janvier 2023, elle visera les extensions de ces bâtiments et les constructions provisoires et courant 2023 tous les autres bâtiments tertiaires (hôtels, commerces, gymnases…).

La RE2020 poursuit trois objectifs principaux : favoriser les bâtiments qui consomment moins et utilisent des énergies moins carbonées, aller progressivement vers des constructions bas-carbone et garantir aux occupants le confort en cas de forte chaleur.

Plus spécifiquement, quels sont les enjeux de cette nouvelle réglementation pour le secteur du bâtiment ?

M-C. B-R. :  Afin d’atteindre ces objectifs, la RE2020 implique une transformation des techniques de construction, des filières professionnelles, des circuits de distribution et des solutions énergétiques tout en accompagnant la montée en compétences des professionnels et en maîtrisant les coûts de construction. Pour réussir cette transition énergétique et environnementale afin de diminuer l’impact de la construction neuve sur le climat, le secteur du BTP doit privilégier l’utilisation d’énergies renouvelables, des matériaux bio-sourcés ou des bétons bas carbone pour construire des logements adaptés aux conditions climatiques futures prenant en compte le confort d’été et la bonne qualité de l’air intérieur des logements. Il doit également faire une large place à l’économie circulaire, notamment via l’utilisation des matériaux et produits issus du réemploi. C’est donc un programme très ambitieux pour les prochaines années !

Justement, quels sont les leviers d’action pour atteindre les objectifs fixés et réussir cette transition ?

M-C. B-R. : Ils sont à la fois d’ordre réglementaire, juridique et technique. Toute la filière étant concernée, les actions de chaque acteur contribuent à l’atteinte des objectifs, du fabricant à l’entreprise qui exécute en passant par les acteurs de la maîtrise d’œuvre et ceux de la maîtrise d’ouvrage.

Le secteur devra privilégier des modes de construction qui émettent peu de gaz à effet de serre, comme les matériaux biosourcés et les énergies renouvelables.

La filière doit faire appel à l’innovation, l’écoconception, au réemploi qui sont perçus comme de véritables opportunités car ils conduisent à l’apparition de nouveaux métiers et de nouveaux outils. Comme dans toute grande mutation, la filière doit s’adapter. Tout d’abord avec l’émergence de nouveaux modes de constructions et de nouveaux métiers, apparaissent de nouveaux risques et donc de nouvelles responsabilités. Il faut en effet résoudre le problème de la normalisation des produits et matériaux biosourcés ou réemployés ainsi que celui de leur performance et durabilité. Il faut également régler la question des compétences dans la mesure où de nouveaux métiers apparaissent et d’autres se transforment ou encore la question de l’assurabilité de ces produits et matériaux.

Ce dernier point est important pour un assureur comme SMABTP. Alors quels sont les enjeux pour SMABTP et quel est son rôle ? 

M-C. B-R. : Des incertitudes juridiques et techniques existent et c’est normal. Le secteur est dans l’attente de règles professionnelles notamment pour les matériaux de réemploi qui permettront de normaliser les risques et d’encadrer les nouvelles techniques de construction, les nouveaux matériaux et les nouvelles missions.

Par exemple, la filière de l’économie circulaire se structure petit à petit. Des start-up comme StockPro ou Cycle Up se créent pour répondre aux besoins en participant, l’un à l’amélioration de la gestion et de la valorisation des stocks de matériaux, l’autre au développement de leur réemploi.

Le rôle d’un assureur comme SMABTP est d’accompagner les acteurs de la construction. Comment ? d’une part en instaurant la discussion en amont et en étudiant les projets et d’autre part en œuvrant pour prévenir les risques et les normaliser. Nos sociétaires doivent considérer SMABTP comme un véritable partenaire.  

Leader de l’assurance construction en France, notre mutuelle est partie prenante dans cette transition environnementale. Notre rôle est donc d’anticiper !

Certes il s’agit d’un véritable tournant dans le secteur du bâtiment mais ce dernier a toujours su s’adapter aux évolutions techniques et réglementaires. Il saura relever le défi une fois de plus !