Japet Medical a développé un modèle d’exosquelette motorisé pour la prévention des maux de dos. Il permet de diminuer l’impact du port de charge et des postures contraignantes sur la colonne vertébrale ainsi que l’impact des tâches répétitives.

Rencontre avec Antoine Noël, son co-fondateur et président.                                              

Comment vous est venue l’idée de cet exosquelette ?

J’ai eu la chance de travailler au développement d’exosquelettes militaires pour l’armée française et l’armée américaine quand j’étais au MIT. À mon retour en France, je me suis associé à une designer produit et à un ingénieur biomédical spécialiste du rachis.

Ensemble, nous avons d’abord travaillé sur un exosquelette pour la rééducation et le traitement des lombalgies avant de nous rendre compte qu’il y avait un vrai besoin dans les entreprises artisanales comme dans les grands groupes. En effet, le vieillissement de la population au travail, le savoir-faire pointu de certains salariés de l’entreprise associés à des difficultés de recrutement entraînent une augmentation du coût des arrêts maladie liés aux lombalgies. Nous avons donc conçu un exosquelette sous l’angle du maintien à l’emploi pour accompagner les personnes souffrant du dos.

Aujourd’hui, la majorité des demandes sont liées à la prévention, notamment celle des TMS, que ce soit pour le dos ou l’épaule. On s’est d’ailleurs allié à d’autres fabricants pour couvrir l’épaule, la nuque et toutes les pathologies et sources de TMS que l’on peut trouver dans les secteurs du BTP, des soins à la personne, de l’industrie, et de la logistique.

Pouvez-vous nous présenter l’exosquelette conçu et fabriqué par Japet Medical, ses caractéristiques physiques ainsi que son fonctionnement ?

L’objectif de notre exosquelette pour le dos est d’agir comme un amortisseur sur la colonne vertébrale, afin d’éviter qu’il y ait trop de charge et qu’il y ait un écrasement progressif des disques intervertébraux. En effet, quand on porte des charges lourdes, on fait des mouvements qui usent précocement le dos. Donc l’exosquelette soutient la zone lombaire et contribue à soulager la pression exercée sur la colonne vertébrale et ainsi éviter une usure précoce menant à des TMS. L’un des atouts majeurs de notre dispositif est qu’il soutient le dos tout en préservant la mobilité et l’activité musculaire, là où un corset ou une ceinture lombaire, très contraignants, peuvent mener à une atrophie musculaire.

Pour cela, l’exosquelette de Japet se compose de moteurs, batteries, capteurs qui adaptent le soutien en fonction des mouvements de l’utilisateur. Il aide le dos de la personne équipée dans tous ses mouvements, que ce soit du port de charge, des mouvements répétitifs ou des postures inconfortables pour le dos. C’est là sa vraie différence, car les autres exosquelettes n’assistent le dos que lorsque l’utilisateur se penche en avant. Ceci en fait un produit intéressant pour des personnes qui ont un métier où les postures sont variées.

Par ailleurs, l’exosquelette Japet existe en plusieurs tailles pour s’adapter à toutes les morphologies. Il est léger (2 kg). Il s’installe facilement en moins de 30 secondes, ce qui permet de s’équiper et de se déséquiper autant de fois que nécessaire au cours de la journée.

 
© Japet.

L’exosquelette est-il adapté au secteur du BTP ?

Le BTP est un secteur particulièrement touché par les TMS qui représentent 20 % des accidents du travail et des maladies professionnelles. La lombalgie est une maladie fréquente dans ce secteur et touche particulièrement certaines activités comme les installations électriques et la plomberie, le gros œuvre, la maçonnerie, la couverture ou encore les travaux de finition, la menuiserie et la vitrerie. Il y a donc un vrai besoin.

Or, c’est un secteur qui investit un peu moins dans les exosquelettes que d’autres secteurs en raison principalement du coût. D’ailleurs, Japet travaille sur des modèles financiers différents (location de l'équipement, leasing…) pour faciliter l’accès.

Cependant, on voit que les entreprises qui emploient de la main-d’œuvre particulièrement qualifiée pour faire des activités très contraignantes recourent de plus en plus au déploiement d’exosquelettes. Nous avons quelques très bons retours d’expérience d’entreprises comme ToiTech, Hervé Thermique ou Claude M BTP, qui depuis qu’elles se sont équipées de l’exosquelette Japet, n’ont plus d’arrêt de travail pour cause de maux de dos.

En parlant de coût, existe-t-il des financements ?

Quelques mots du coût de l’exosquelette. Le prix de 7 700 euros comprend, outre le dispositif en lui-même, le processus d’intégration de l’exosquelette, ainsi que le suivi et l’accompagnement dans la prise en main.

L’exosquelette étant un dispositif médical (reconnu et certifié comme tel), il y a une prise en charge financière possible dans le cadre du maintien à l’emploi. Cela suppose que le salarié ait été reconnu travailleur handicapé. En revanche, sur la partie prévention pure, il n’y a pas de prise en charge généralisée même s’il y a quelques expérimentations par l’Assurance Maladie pour les entreprises du BTP de moins de 50 salariés par exemple. Aujourd’hui on voit des expérimentations de financements, mais il n’y a pas encore de financement à grande échelle.

La technologie pointue de l’exosquelette Japet peut amener une certaine réticence pour l’utilisateur. L’offre Japet inclut-elle un accompagnement ?

L’accompagnement des clients est pour Japet Medical essentiel. Nous avons donc mis en place un accompagnement autour de plusieurs axes :

• tout d’abord, nous travaillons sur la perception que les personnes peuvent avoir de l’exosquelette et dédramatisons son image, car en réalité, bien expliqué, c’est un produit compact et simple à utiliser ;
• ensuite, nous expliquons le fonctionnement du dispositif ;
• il faut compter environ une semaine pour que la personne s’approprie l’exosquelette en suivant notre protocole d’intégration. Au cours du premier mois, nous effectuons des appels et faisons remplir un questionnaire en ligne pour nous assurer que tout se passe bien et pour détecter les éventuels problèmes ;
• enfin nous faisons un point avec l’entreprise pour nous assurer que tout s’est bien passé et voir quels sont les résultats de la première phase de l’implémentation.

Les résultats et les retours sont bons comme je le disais et confirment ce que des études indépendantes ont démontré : un soulagement de la douleur lombaire, une véritable action de prévention des TMS en entreprise.