28 octobre 2025

Briques de verre et limites de propriété : constructeurs de maisons individuelles, soyez vigilants !

La densification des constructions entraîne des questions techniques et juridiques nouvelles. C’est notamment le cas des ouvertures en limite de propriété. L’utilisation des briques de verre est une solution intéressante mais nécessite quelques points de vigilance de la part du constructeur de maisons individuelles !    

Construire en zone dense 

La loi « Climat et Résilience » et l’objectif de Zéro Artificialisation Nette (ZAN) imposent désormais de limiter l’artificialisation des sols. Dans ce contexte, les parcelles constructibles deviennent plus petites, et les projets s’implantent de plus en plus souvent en limite séparative.

Pour les constructeurs de maisons individuelles, cette densification soulève des questions techniques et juridiques nouvelles, notamment lorsqu’il s’agit de concevoir des ouvertures en limite de propriété.

Les briques de verre, fréquemment utilisées pour apporter de la lumière naturelle dans une pièce, constituent une solution à étudier.

Le cadre légal : jours de souffrance et vues

Le Code civil (articles 676 à 680) distingue :

les vues
: fenêtres permettant d’apercevoir la propriété voisine. Elles sont interdites en limite de propriété, sauf à respecter des distances minimales (1,90 m pour les vues droites, 0,60 m pour les vues obliques – article 678) ; 

les jours de souffrance :
ouvertures fixes et translucides, destinées uniquement à laisser passer la lumière sans vue possible. Elles sont autorisées en limite séparative mais sous conditions strictes (articles 676 et 677 du Code civil) : verre dormant, translucide et situé à 2,60 m au-dessus du plancher pour un rez-de-chaussée, et 1,90 m pour un étage.

Les briques de verre s’inscrivent dans ce régime.

Les briques de verre : un statut confirmé par la jurisprudence 

  • Cour de cassation, 3e civ., 11 avril 2012, n° 11-13.427 : un mur en briques de verre édifié en limite séparative constitue bien un « jour de souffrance » et non une vue.
  • Cour d’appel de Paris, 5 juillet 2012, Pôle 4, ch. 1 (RG n° 11/01209): la cour a réaffirmé que le caractère translucide et non ouvrant des briques les distingue d’une véritable fenêtre.
  • Cour d’appel d’Angers, 15 mars 1988, Gasteau c/ Bourgeois (CDJO n°46311) : la cour a précisé qu’un tel aménagement n’est licite que s’il est implanté sur un mur privatif. Sur un mur mitoyen, aucune ouverture – même en briques de verre – n’est possible sans l’accord exprès du voisin.

En pratique : le constructeur doit s’assurer que le mur accueillant les briques de verre n’est pas mitoyen. Dans le cas contraire, l’installation est interdite.

Même assimilée à un jour de souffrance, la paroi de brique de verre est considérée comme constitutive du mur et n’est donc pas soumise à la règle de hauteur imposée par l’article 677 du Code civil, son emplacement en hauteur est donc libre.

L’absence de servitude : liberté de construire pour le voisin

Un jour de souffrance ne crée pas de servitude au profit du fonds bénéficiaire.

  • Le voisin conserve le droit de construire en limite séparative, même devant un panneau en briques de verre.
  • Cette construction peut totalement obstruer l’apport de lumière, sans que le propriétaire du jour de souffrance puisse s’y opposer.

La Cour de cassation (notamment dans l’arrêt précité du 11 avril 2012) a confirmé ce principe : la présence de briques de verre ne limite pas le droit à bâtir du voisin.

Conséquence pratique : le constructeur doit informer le maître d’ouvrage que la luminosité ainsi créée n’est jamais garantie dans le temps.

Attention à l’assurance !

Les qualités thermiques, phoniques et pratiques de la brique de verre ne doivent pas faire oublier que leur usage rentre dans le cadre des techniques non courantes. Il convient donc, avant tout usage de ce procédé, d’en informer votre assureur afin de régulariser contractuellement votre couverture d’assurance.

Pour résumer

Lors de la conception de la maison :

  • les briques de verre peuvent être un choix esthétique et économique pour éclairer une pièce aveugle ; 
  • toutefois, il faut vérifier le caractère privatif du mur et alerter le client sur la précarité de cet apport lumineux ; 
  • formaliser avec son assureur le recours à cette technique non courante.

Lorsqu’une maison est édifiée contre un mur en briques de verre existant :

  • le constructeur n’a aucune obligation de préserver la lumière du voisin ;
  • par précaution, il est conseillé d’informer en amont pour limiter les risques de conflit de voisinage.