Prescription civile : les règles depuis 2008

Mis à jour le 30 mai 2023

Une importante réforme du régime de la prescription civile a eu lieu par une loi du 17 juin 2008 (loi 2008-561). Cette réforme concerne les différents régimes de prescription civile en instituant un délai de droit commun. Rappel des règles.

Les principes généraux

Dans notre législation le créancier qui ne réagit pas, dans un délai déterminé, perd son droit d’action et, parallèlement, le débiteur de l’obligation se trouve déchargé de sa dette : on parle alors de prescription de l’action. Il existe plusieurs durées de prescription : une durée de droit commun (c'est-à-dire ne relevant pas de dispositions spécifiques), et de nombreux délais particuliers dont le régime applicable aux responsabilités des constructeurs. Ce sont les règles applicables aux différents régimes de prescription des actions civiles et commerciales qui ont fait l’objet de cette réforme.

Une simplification bienvenue

Jusqu’à 2008, le domaine de la prescription civile était complexe et objet d’une grande variété, plus de 250 régimes différents ayant été recensés par la Cour de cassation. Critiquée pour ce manque d’uniformité, cette situation était source d’insécurité juridique. Aussi, dès 2004, la Cour de cassation dans son rapport annuel suggérait une réforme en profondeur. La loi du 17 juin 2008 a modifié en profondeur le régime de la prescription extinctive. Depuis, deux articles du Code civil traitent du droit commun de la prescription : les articles 2224 et 2232.

Les délais de la prescription « de droit commun »

La durée de la prescription de droit commun repose désormais sur deux
délais :

  • un délai de cinq ans, qui se substitue à l’ancienne prescription trentenaire, et dont le point de départ, qualifié de « flottant », est le jour « où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer» (article 2224 du Code civil) ;  
  • un délai « butoir », de vingt ans, courant à compter d’une date fixe constituée par la « naissance du droit » (article 2232 du Code civil).

Toute action doit donc être engagée dans les limites de cinq ans à compter de la connaissance des faits, et en tout état de cause dans les 20 ans à compter du fait générateur du droit.

Ces nouvelles dispositions s’appliquent à tous les délais de prescription (y compris commerciaux) à l’exception de certaines actions qui gardent des règles spécifiques, en particulier :

  • les actions concernant des dommages corporels qui conservent un délai pour agir de dix ans « à compter de la date de consolidation du dommage initial ou aggravé» ;
  • la réparation des dommages à l’environnement qui se prescrivent par trente ans à compter du fait générateur du dommage ;
  • le droit de la construction ;
  • le recouvrement des créances constatées par une décision de justice (en général 10 ans à compter de la décision définitive) ;
  • et les prescriptions spéciales…

Responsabilités des constructeurs : peu de changements

La loi du 17 juin 2008 n’a pas fondamentalement modifié le régime de prescription des différentes actions pouvant être engagées contre les constructeurs pour les dommages affectant les ouvrages après leur réception et leurs conséquences :

  • les responsabilités « légales » des locateurs d’ouvrage, issues de la loi Spinetta (bon fonctionnement et décennale) se prescrivent toujours par 2 ou 10 ans à compter de la réception (nouvel article 1792-4-1 du Code civil remplaçant l’article 2270) ;
  • la responsabilité des sous-traitants pour les dommages de nature décennale (ou de bon fonctionnement) s’inscrit aussi dans les délais de 2 ou 10 ans après la réception, selon les dispositions codifiées par l’ordonnance du 8 juin 2005 qui avait entériné la position adoptée par les tribunaux (nouvel article 1792-4-2 du Code civil remplaçant l’article 2270-2) ;
  • les actions entre constructeurs liés au maître d’ouvrage par des conventions distinctes, et donc tiers entre eux, sont de nature quasi délictuelle. Ces recours relèvent des dispositions de l'article 2224 du code civil et se prescrivent par cinq ans à compter de la connaissance des désordres ;
  • en revanche, toutes les autres responsabilités des différents constructeurs (contractuelles ou extracontractuelles) concernant des dommages après réception, se prescrivent désormais aussi par 10 ans à compter de la réception (nouvel article 1792-4-3 du Code civil remplaçant les articles 2262 et 2270-1).

 

Tableau récapitulatif

Fondement de l'action Avant la loi du 17 juin 2008 Loi du 17 juin 2008
Anciens articles Durée et point de départ Nouveaux articles Durée et point de départ
Responsabilités après réception
Responsabilités décennales et de bon fonctionnement des locateurs d'ouvrage 2270 2 ou 10 ans à compter de la réception 1792-4-1 2 ou 10 ans à compter de la réception
Responsabilités des sous-traitants 2270-2 (ordonnance du 8 juin 2005) 2 ou 10 ans à compter de la réception 1792-4-2 2 ou 10 ans à compter de la réception
Responsabilités contractuelles
  • Pour les dommages matériels à l'ouvrage
Jurisprudence 10 ans à compter de la réception 1792-4-3 10 ans à compter de la réception
  • Pour les autres dommages
2262 30 ans à compter du dommage
Responsabilité civile générale
Contractuelle 2262 30 ans à compter du dommage 2224 ou L. 110-4 du Code du commerce et 2232 5 ans à compter de la connaissance des faits dans les limites de 20 ans
Extra-contractuelle ou entre commerçants 2270-1 ou L. 110-4 du Code du commerce 10 ans à compter de la manifestation du dommage

 

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