Le trouble anormal de voisinage en cours de chantier dans les travaux publics

Mis à jour le 20 mars 2023

Lors de chantiers de travaux publics, les entreprises intervenantes peuvent faire l’objet de réclamations de la part de riverains ou d’usagers qui subissent des nuisances et/ou des dommages du fait des travaux.

Lors de chantiers de travaux publics, les entreprises intervenantes peuvent faire l’objet de réclamations de la part de riverains ou d’usagers qui subissent des nuisances et/ou des dommages du fait des travaux.

Les chantiers de travaux publics peuvent générer des nuisances qui se répartissent en 4 catégories :

  • les dommages matériels causés aux immeubles mitoyens (avoisinants),
  • les nuisances sensorielles (bruits, vibrations, poussières ...),
  • les nuisances d'accessibilité (modification de la circulation...),

les nuisances d'hygiène et de sécurité (pollution visuelle, déchets, émanations toxiques...).

Le diagnostic

Les dommages et nuisances sont de nature différentes selon l’ampleur, la durée et la situation des chantiers.

Les dommages matériels causés aux avoisinants

Les opérations de travaux publics, notamment en phase de démolition, terrassement, fondations, peuvent être à l’origine de divers incidents et provoquer des dommages matériels aux avoisinants : fissures, bris, effondrements de murs, enfoncements par des engins de chantiers, chute de matériaux chez les tiers qui engagent la responsabilité des intervenants.

Les nuisances sensorielles

Les nuisances sonores

Lorsqu’il est constaté une insuffisance de précaution pour limiter les bruits inhérents à l’utilisation d’outils ou de techniques de démolition.

Les vibrations

Les travaux de vibrofonçage, forage, brise roche hydraulique, engendrent des vibrations qui peuvent perturber la vie des riverains et éventuellement causer des fissurations aux immeubles.

L’émission de poussières

La circulation d’engins ou de camions, la démolition d’ouvrages d’art, le traitement de sol, les forages, le creusement de tranchées ou de simples marteaux piqueurs, génèrent des poussières avec mise en suspension de polluants, de métaux lourds. Elles impactent les centrales d’air sur les toitures et peuvent rendre les chaussées glissantes.

La boue

La présence de boue sur la chaussée fait courir un risque aux usagers de la route, tout particulièrement les deux-roues.

La perte de vue ou d’ensoleillement pendant ou après le chantier

Ils sont considérés comme troubles du voisinage. Des recours sont possibles mais peu aboutissent si les services de l’urbanisme et la préfecture ont donné leur feu vert sur l’opportunité des travaux et donc du chantier.

Certaines compensations demeurent néanmoins possibles.

Les nuisances d’accessibilité

Le passage de camions et le transport de matériaux

En plus de générer des poussières et des nuisances sonores, ce type de transport, s’il n’est pas encadré, peut se révéler « accidentogène » si des gravillons ou sables, de la boue, des déchets, des objets ou matériaux tombent des bennes. La dégradation des voies est aussi la résultante d’un chantier non maîtrisé du point de vue du choix des circuits à emprunter, des horaires, du type de camions sollicités.

Fermeture de certaines voies d’accès, modification de l’accessibilité et de la mobilité

La présence d’un chantier entraine le plus souvent une modification des conditions de circulation (voir fiche Travaux sous circulation). Le défaut d’information des usagers, le défaut de balisage peuvent conduire à des plaintes et réclamations, voire à des accidents préjudiciables à la bonne poursuite du chantier.

Les nuisances d’hygiène et sécurité

La pollution visuelle

Elle peut aussi être classée dans les nuisances sensorielles notamment en cas de chantiers de grande ampleur (présence de panneaux, de déchets, éclairage non maîtrisé...).

Les déchets

La gestion des déchets revêt un caractère d’extrême importance également pour l‘acception du chantier par les riverains. Les pratiques illégales telles que l’abandon des déchets ou le dépôt sauvage, le brûlage de déchets sont passibles de poursuites.

 La pollution ponctuelle et/ou grave

Au cours d’un chantier, en l’absence de précautions particulières, le déversement de substances liquides et le rejet de solvants et autres produits dangereux sont susceptibles de créer des pollutions importantes et d'être la cause de l’endommagement des réseaux et des installations de traitement des eaux usées (y compris des nappes phréatiques).

Les bonnes pratiques et conseils de prévention

Le rôle des différents acteurs

Maître d’ouvrage et maître d’oeuvre

  • Définir dans le cahier des charges les mesures à mettre en oeuvre par les intervenants pour prévenir les risques de nuisance et/ou de dommages du fait des travaux. Informer les riverains du chantier sur le projet et les travaux en cours et à venir.
  • Adapter la période de travaux et prévoir les plages horaires pour les tâches bruyantes en accord avec les arrêtés locaux.
  • Rédiger et diffuser la charte « chantier propre » ou « chantier faibles nuisances ».
  • Co-créer un carnet de bord environnemental du chantier (géré par le maître d’oeuvre) et en assurer la traçabilité. Les projets touchant à l’environnement seront précédés d’une étude d’impact.


En outre, concernant l’organisation du chantier :

  • Les différentes zones doivent être définies,
  • Les travaux concernant les réseaux enterrés devront respecter les procédures des DT/DICT (voir la fiche sur les réseaux enterrés è Fiche dossier « Les travaux à proximité des réseaux aériens et enterrés »),
  • Les demandes et possibilités de branchement et autorisations de voiries seront précisées mais sont à demander par l’entreprise.

Entreprise

  • Signature de la charte « chantier faibles nuisances »,
  • Participation à la gestion du carnet de bord environnemental. Prendre part aux réunions qualité environnement,
  • Organisation du chantier : en assurer la propreté, mettre en place des panneaux d'information,
  • Désignation du référent environnement chantier (REC) et des référents environnement de chaque entreprise (REE). Prévoir notamment le lien avec le coordonnateur SPS,
  •  Formalisation d’un plan de communication à la destination des riverains (affichage projet, bulletin mensuel d’avancement, visites de chantier, réunions d’information, sensibilisation du personnel),
  • Organisation d’une réunion d’information à l’arrivée de nouvelles entreprises et participation au montage de la réunion,
  • Diffusion des FDS et FDES des produits et techniques utilisés,
  • Gestion et collecte sélective des déchets : établir un SOSED ou SOGED (schéma d’organisation et de gestion, suivi des déchets destiné à tous les intervenants du chantier) par le responsable chantier.

Réduction du risque « dommages matériels »

Les bonnes pratiques relèvent du domaine technique, de la compétence et de la qualification des entreprises, du bon sens et de l’attention apportés à la réalisation de l’ouvrage.

Réduction des nuisances sonores

  • Prévoir les circulations et les livraisons,
  • Aménager des plages horaires pour les tâches bruyantes en accord avec la maîtrise d’ouvrage et la maîtrise d’oeuvre,
  • Mettre en place des écrans acoustiques (parois anti-bruit) si un fort niveau de bruit persiste.

Réduction des vibrations

  •  Réalisation d’une étude d’impact B&V (bruit et vibrations).

Pollutions ponctuelles de l’eau et des sols

  • Assurer la maintenance des engins de chantier, prévoir des bacs de rétention et pistolets anti gouttes pour faire le plein des engins,
  • Stocker tous les produits dans de bonnes conditions (ventilation locaux, sous abris),
  • Prévoir pour agir en situation d’urgence, disposer par exemple d’un kit de dépollution et de procédures pour action.

Poussières

  • Entretenir les machines et utiliser des filtres à poussières, bâcher les camions.

Boues et propreté du chantier

  • Prévoir une station de lavage des roues des camions à la sortie du chantier (débourbeur). Les entreprises assurent un nettoyage régulier des voiries et abords du chantier.

Passage de camions et d’engins

  • Effectuer des référés préventifs sur l’état des existants (chaussées),
  • Optimiser les circuits de desserte du chantier (municipalité) et les horaires de passage.

Polluants, fumées, odeurs et particules

  • Utiliser des enrobés bitumineux tièdes possédant les mêmes caractéristiques que les enrobés bitumineux chauds.

Gestion des déchets

  • Si possible, trier les déchets sur place,
  • Mettre en place une zone de stockage spécifique pour les déchets dangereux (bacs spécifiques),
  • Sécuriser les bennes pour éviter les envols ou les malveillances (bâches, filets,grilles),
  • Utiliser la démarche SOSED (schéma d’organisation et de suivi de l’élimination des déchets de chantier).

Nuisances visuelles

Des solutions existent pour rendre le chantier plus acceptable aux yeux des riverains et l’intégrer dans l’environnement :

  • Clôture,
  • Éclairage nocturne : les éclairages publicitaires et décoratifs doivent être proscrits.

Fermeture de certaines voies d’accès, perturbation de l’accessibilité et de la mobilité

La préparation en amont du chantier conditionne sa réussite. La mise en place de plusieurs dispositifs permet de réduire significativement les contraintes de mobilité (voir la fiche Travaux sous circulation).

  • Étudier l’impact des différents phasages sur le temps de parcours des usagers et construire un dossier d’exploitation,
  • Respecter les jours de grande circulation, programmer les travaux en fonction de l’état du trafic.

Bilan du chantier

En fin de réalisation, le responsable chantier principal établira avec l’aide des responsables environnement entreprises un bilan du chantier documenté avec photos et éléments justificatifs (factures, tableaux de bord, PV, bilan des incidents et actions correctives associées, questionnaire de satisfaction).

Ce qu'il faut retenir

  • Le trouble anormal de voisinage dans les TP s’exprime en termes de dommages matériels et de nuisances sensorielles, d’accessibilité ou d’hygiène et sécurité.
  • Les bonnes pratiques de réduction des nuisances amenuisent le risque de mise en cause. Quatre points sensibles : le bruit, le passage de camions, les poussières, et la gestion des déchets.
  • Bien que non obligatoire, il est recommandé à l’entreprise de souscrire une assurance de responsabilité civile pour des dommages causés aux tiers. Il est donc primordial de vérifier à chaque fois les conditions générales attachées au dossier concerné. Enfin, il est important de vérifier les exclusions qui peuvent s’appliquer en matière de trouble anormal de voisinage.

A consulter

  • Article 1240 du Code civil et article 544 du Code civil.
  • Article L. 112-16 du Code de la construction et de l'habitation.
  • Article L. 2212-2 du Code général des collectivités territoriales.
  • Article L. 141-9 de la voirie routière.
  • Articles L. 571-2 et R. 571-1 à R. 571-24 du Code de l’environnement : procédure d’homologation et de certification de conformité aux seuils fixés (matériels mis sur le marché avant le 4 mai 2002).
  • Articles L. 541-1 et suivants du Code de l’environnement codifiant l’élimination des déchets ainsi que la récupération des matériaux.
  • Articles 96 et 99.7 du Règlement sanitaire départementale type (Circulaire du 9 août 1978) concernant les abords des chantiers et la protection des lieux publics contre la poussière.
  • Article 84 du Règlement sanitaire départemental type et article 7 de la Loi 75-633 du 15 juillet 1975 modifié : brûlage de déchets sur chantier ou en dehors.
  • Arrêté du 18 mars 2002 applicable aux matériels mis sur le marché à compter du 4 mai 2002 : étiquetage et limitation du niveau sonore.
  • Circulaire du 23/07/86 relative aux vibrations mécaniques émises dans l'environnement par les installations classées pour la protection de l'environnement et Circulaire n°96-52 du 02/07/1996.
  • Circulaire du Ministère de l’environnement du 15 février 2000 relative à la planification de la gestion des déchets de chantier du bâtiment et des travaux publics.
  • Directives n°2003/10/CE du 6 février 2003 concernant les prescriptions minimales de sécurité et de santé relatives à l’exposition des travailleurs aux risques dus aux agents physiques.
  • Loi n° 92-646 du 13 juillet 1992 modifiant la Loi 75-633 du 15 juillet 1975 relative à l’élimination des déchets et à la récupération des matériaux.
  • Arrêté du 12 mai 1997 : Matériel et engins de chantier.
  • Décret n°2006-892 du 19 juillet 2006 : Niveaux de bruit.
  •  Arrêté du 22/09/1994 ICPE.
  •  Recommandations GFEE (Recommandations relatives aux seuils-limites de vibrations dues aux tirs de mines – GFEE 15/03/1991).
  •  Guides CNB : Bruits des chantiers : Missions incombant aux acteurs d’une opération de construction pour limiter les nuisances.
  • Recommandations de l’AFTES.
  •  Norme NF E90-020 de juillet 2007 (Vibrations et chocs mécaniques – Méthodes de mesurage et d’évaluation des réponses des constructions, des matériels sensibles et des occupants).
  • Prévention du risque « Poussières » pour les Travaux Publics FNTP OPPBTP USIRF, SERCE, 2016.
  • Qualité de l’air et émissions polluantes des chantiers du BTP, état des connaissances et mesures d'atténuation dans le bâtiment et les travaux publics en faveur de la qualité de l'air, ADEME 2017.
  • Fiche technique - Déchets des travaux publics, ADEME 2014.
  • Exemple de charte des chantiers à moindres nuisances.