
Les désordres des cuvelages
Les infiltrations et les fuites d’eau ne sont pas sans conséquences sur les ouvrages souterrains. De nombreux procédés permettent pourtant de traiter l’étanchéité de ces ouvrages. Ils nécessitent toutefois une attention particulière dans leur mise en oeuvre.
Les infiltrations et les fuites d’eau ne sont pas sans conséquences sur les ouvrages souterrains. De nombreux procédés permettent pourtant de traiter l’étanchéité de ces ouvrages. Ils nécessitent toutefois une attention particulière dans leur mise en oeuvre.
Le constat
L'étanchéité des ouvrages souterrains peut être traitée par une dizaine de familles de procédés comme par exemple, les géomembranes synthétiques, les géomembranes bitumineuses ou les géosynthétiques bentonitiques.
Ces dernières années, la construction de « structures intégrées » tend à se généraliser pour les tranchées couvertes. Il s’agit d’ouvrages pour lesquels les parois verticales (parois moulées pour l’essentiel) sont traitées comme des structures relativement étanches avec un radier et une dalle supérieure rendus étanches.
Mise en place d'une géomembrane synthétique en tunnel en extrados avant mise en place du ferraillage, masque/coffrage et coulage béton.Les désordres les plus couramment observés sur tous ces ouvrages sont des infiltrations et fuites d’eau dont les conséquences sont la formation de verglas au niveau de la chaussée (tunnels routiers), la formation de stalactite (tunnels), la détérioration de matériel d'exploitation lié au fonctionnement et à la sécurité de l'ouvrage (métro). Ces désordres peuvent porter atteinte à leur image dans les zones accessibles au public (gares, métro).
Dans certains cas, un compartimentage du dispositif d'étanchéité doit permettre de faciliter le repérage des désordres et leurs réparations. Cependant, ces compartimentages peuvent eux-mêmes souffrir de défauts de mise en oeuvre.
Le diagnostic
Les désordres observés relèvent parfois de problématiques de conception (liées au choix de produit) mais le plus souvent de mise en oeuvre.
En phase de conception, une mauvais définition des critères de résistance du procédé d'étanchéité (résistance aux agents agressifs, résistance de la liaison au support, tenue à la température, adaptabilité au support) peut entraîner un vieillissement prématuré ou une déchirure du procédé et donc des sinistres.
En phase d'exécution, les pathologies varient selon le type de procédé mis en oeuvre :
1. Dispositifs d’étanchéité par géomembranes synthétiques : perforations et déchirures dues à une irrégularité du support, à la présence de fibres, de
ferraillage, au masque de bétonnage, au remblaiement ; détérioration des parties en attente des géomembranes due à des poinçonnements, des salissures, à de l'absorption d’eau, au rayonnement U.V. ; dommage dû au feu (perforations, brûlures, carbonisations liées à la co-activité) ;
2. Dispositifs d’étanchéité par procédés asphaltiques : cloquage dû au dégazage du support, fissuration ;
3. Dispositifs d’étanchéité par procédés bitumineux : cloquage dû au dégazage du support, à l'adhérence très variable selon la préparation du support, dommage généré par des surépaisseurs E.I.F ou primaire, détérioration des attentes en cours de travaux ;
4. Dispositifs d’étanchéité par géomembrane bitumineuse : poinçonnements statiques et dynamiques, sensibilité de la géomembrane au fluage en attente verticale ;
5. Systèmes d’étanchéité liquides extrados : dommage dû à l’humidité du support, cloquage ;
6. Dispositifs d’étanchéité par géomembrane bentonitique : dommage dû à la pénétration des racines de la végétation, sensibilité à l’humidité avant mise en oeuvre (durant le stockage notamment) ;
7. Structures intégrées : infiltrations à la jonction radier-voûte (mauvais traitement de l’arrêt de la membrane d’étanchéité du radier dans la paroi verticale : engravure insuffisante, collage inefficace) avec une augmentation du risque au droit des points triples (raccordement de l’étanchéité au droit des joints entre parois moulées). Les perforations accidentelles et le mauvais traitement des traversées (passage de gaines, pose d’outils de surveillance de convergence des voûtes, …) des géomembranes (synthétiques et bitumineuses) sont une des principales causes de désordres.
Dans le cas particulier des géomembranes synthétiques, le compartimentage présente également des points critiques : mauvaise soudure des profilés, pollution des ancrages du profilé avant bétonnage, écrasement des ancrages du profilé… Il est à noter cependant que l'usage des géomembranes transparentes et le développement d’outils de soudure automatique (double soudure avec canal de contrôle) a permis de réduire significativement les défauts d’étanchéité liés à la réalisation des soudures.
Enfin, ces dernières années, avec le développement des structures intégrées, les désordres liés au traitement de la jonction radier étanche – paroi verticale relativement étanche se sont multipliés.
Les bonnes pratiques et conseils de prévention
Phase de conception
Il est important de définir précisément les caractéristiques attendues pour le procédé d’étanchéité et notamment :
- les caractéristiques de l’environnement au contact de l’étanchéité (sol environnant, eaux, alcalinité des bétons, végétations) ;
- le niveau de pression hydrostatique ;
- le niveau d’effort induit par le terrain encaissant ;
- le procédé à mettre en oeuvre en fonction du contexte des travaux et de l'ouvrage.
L’approche de l’étanchéité d’un ouvrage ne peut être dissociée de la conception du système de drainage qui est chargé de récupérer et de drainer les eaux vers un exutoire. Pour ce faire, il est indispensable de recenser toutes les arrivées d’eau potentielles ainsi que les différents niveaux de la nappe phréatique, en particulier le niveau des plus hautes eaux.
Rappelons également que dans le cas des géomembranes, il est recommandé d'exiger des entreprises titulaires du marché les certificats ASQUAL suivants :
- le certificat produit du géotextile ;
- le certificat produit de la membrane (hors membrane bentonitique) ;
- le certificat de service Application de géomembrane – Soudage répertoriant les soudeurs et les familles de géomembranes concernées ;
- le certificat de service Application de géomembrane – Responsabilité de chantier ;
- le certificat Qualification d’entreprise recensant par exemple les familles de géomembranes et les périmètres des ouvrages concernés.
Nota : La certification ASQUAL n'est pas imposée par le fascicule 67 du Cahier des clauses techniques générales (CCTG) Titre III : étanchéité des ouvrages souterrains. Il s'agit d'une certification volontaire. Dans le cas des produits, elle garantit que celui-ci respecte les exigences spécifiques à sa famille.
Pose d'une membrane géodrain sur l'extrados d'une tranchée couverte ( structure relativement étanche)
Phase de chantier
Le procédé retenu devra répondre aux exigences définies en phase de conception, notamment pour ce qui concerne les hauteurs d’eau et la compatibilité chimique avec l’environnement.
Il est nécessaire de respecter scrupuleusement les prescriptions techniques définies dans le fascicule 67 du CCTG Titre III ou, le cas échéant, les avis d’expert AFTES ou les avis techniques CETU. Ces prescriptions portent par exemple sur les dimensions des joints de soudures dans le cas des membranes, les dimensions des recouvrements entre lés, les dispositions à respecter au droit des points singuliers (joints, angles, pieux, tirants, traversées des géomembranes…), les températures d’application des procédés.
Les supports doivent être préparés et contrôlés avant application du dispositif d’étanchéité. Dans le cas d’une pose de géomembrane sur béton avec fibres métalliques, la réalisation d’une couche de finition en béton projeté non fibré ou la pose d’un géotextile renforcé peut s’avérer nécessaire.
Toutes les précautions doivent être prises pour éviter les déchirures de la membrane ou du revêtement lors de la pose du ferraillage ou des travaux de remblaiements. Une protection supplémentaire (géotextile renforcé, lit de sable, protection lourde) entre le dispositif d’étanchéité et le remblai peut s’avérer nécessaire.
En matière de contrôle
A chaque phase du projet, l’entreprise doit présenter un plan qualité qui détaille les moyens et l’organisation qu’elle s’engage à mettre en oeuvre. En cours de travaux, le titulaire des travaux effectue son contrôle intérieur, dont les résultats sont reportés sur les documents de contrôle qu’il a défini.
En complément de ce contrôle intérieur, le maître d’ouvrage missionne un contrôle extérieur afin de vérifier la mise en oeuvre du procédé d’étanchéité. Lors de ses passages sur site, le contrôleur extérieur examine la pose du procédé d’étanchéité en partie courante et au droit des points singuliers. Il contrôle également les assemblages soudés en effectuant des prélèvements pour procéder à des essais mécaniques en laboratoire.
Dans le cas des stations enterrées, s’agissant d’un établissement recevant du public, il est généralement fait application du fascicule 67 du CCTG Titre III et du D.T.U. 14.1 - Travaux de cuvelage. Ces établissements font également l'objet d'une mission de contrôle technique telle que prévue par le Code de la Construction et de l'Habitation et décrite dans la norme NF P03-100.
Crédits photos : Jean Louis Mahuet
Ce qu'il faut retenir
- Définir les exigences requises pour le procédé (fascicule 67, avis d'experts AFTES, avis technique CETU),
- Respecter les consignes et les limites du procédé,
- Effectuer le contrôle de la mise en oeuvre,
- Assurer l’intégrité du procédé pendant toutes les phases du chantier (autocontrôle de l'entreprise).
A consulter
> Fascicule 67 du Cahier des clauses techniques générales (CCTG) «Titre III : Étanchéité des ouvrages souterrains »
Le présent fascicule est applicable aux ouvrages suivants :
- tunnel creusé,
- tunnel foré,
- tranchée couverte,
- ouvrage d’art sous plateforme routière, autoroutière et ferroviaire, avec étanchéité sous le remblai,
- parking souterrain, hors emprise bâtiments,
- cuvelage d’ouvrages de génie civil enterrés.
> Recommandations de l’Association française des tunnels et de l’espace souterrain (AFTES)
> Tunnels et espaces souterrains n° 247 – Janvier/Février 2015 Présentation des nouvelles recommandations de l'AFTES relatives aux traitements d'arrêts d'eau dans les ouvrages souterrains