
Désordres sur les avoisinants
Les chantiers de travaux publics peuvent engendrer des dommages matériels sur les ouvrages ou les biens mitoyens. Quels sont les dommages les plus fréquents ? Quelles en sont les causes ? Adopter les bons réflexes sur le terrain est essentiel pour sécuriser les chantiers.
Les chantiers de travaux publics peuvent engendrer des dommages matériels sur les ouvrages ou les biens mitoyens. Quels sont les dommages les plus fréquents ? Quelles en sont les causes ? Adopter les bons réflexes sur le terrain est essentiel pour sécuriser les chantiers.
Introduction
Cette fiche traite des dommages matériels engendrés par des chantiers de travaux publics sur les ouvrages ou biens mitoyens. Les autres typologies de dommages aux tiers sont des troubles anormaux du voisinage évoqués dans la fiche TP N° 16.
Au sens de la norme NF P 94‑500 relative aux missions d’ingénierie géotechnique de novembre 2013, actuellement en vigueur :
- les avoisinants sont définis comme « les bâtiments, ouvrages, aménagements de terrains ou biens, situés dans la ZIG de l’opération de construction » ;
- la ZIG « zone d’influence géotechnique » est le « volumede terrain au sein duquel il y a interaction entre, d’une part, l’ouvrage ou l’aménagement de terrain (du fait de sa réalisation et de son exploitation), et, d’autre part, l’environnement (sols, ouvrages, aménagements de terrains ou biens
environnants).
Le constat
Les dommages matériels causés aux avoisinants peuvent être de différentes natures : fissures, déstabilisations d’ouvrage ou de terrains, bris, effondrement de murs, rupture de canalisation, enfoncement par des engins de chantier, chutes de matériaux chez les tiers, etc....
Les parties d’ouvrage les plus souvent endommagées sont :
- les fondations et structures des avoisinants
La fissuration d’ouvrages avoisinants peut se produire pendant la réalisation de travaux de terrassement à proximité de leurs fondations. Ces dommages peuvent aller jusqu’à la déstabilisation voire l’effondrement des parois et des ouvrages dans la fouille et atteindre l’ensemble de la structure de l’ouvrage.
Le personnel et le matériel peuvent être ensevelis lors de sinistres majeurs.
- les réseaux
Lors de travaux de terrassement ou de forages, les canalisations ou réseaux situés dans le terrain peuvent subir des dommages allant des tassements à la rupture. D’autre part, la méconnaissance de l’implantation des réseaux enterrés (branchements compris) engendre chaque année de nombreux dommages : explosions à la suite de fuites de gaz, réseaux abîmés à la suite de heurts d’outils, écoulements d’eau, réseaux de chaleur percés…
- la déstabilisation de terrains
La suppression de la butée de pied du talus ou du versant lors des travaux de terrassement peut engendrer un glissement de terrain et être à l’origine des dommages sur les voiries, canalisations ou divers ouvrages reposant sur le talus ou sur le versant.
Le diagnostic
Les fondations et structures des avoisinants
- L’origine des dommages se trouve souvent dans l’absence de réalisation d’études de sols suffisantes et de reconnaissance de la nature et de l’état des fondations des avoisinants.La forme et l’extension de la zone d’influence géotechnique sont spécifiques à chaque site et à chaque ouvrage ou aménagement de terrain. Elles ont donc une incidence sur la conception des projets et la réalisation des travaux.
- L’absence de coordination entre les différents intervenants peut être source de dommages aux avoisinants. Par exemple, lors de la réalisation de voiles par passes, des engins de chantier peuvent endommager les semelles de butons des voiles et provoquer la déstabilisation de ceux-ci et des immeubles mitoyens.
- L’usage de matériel de chantier non approprié peut être aussi à l’origine de désordres.
- La méconnaissance de la structure et des fondations de l’immeuble voisin et le cas échéant l’absence de reprise en sous-oeuvre peuvent générer des incertitudes et des aléas importants, à l’origine de l’effondrement ou de la déstabilisation des immeubles voisins. En amont, il est souvent constaté l’absence de « diagnostic structure » des ouvrages mitoyens par un BET spécialisé.
Les réseaux
L’absence d’identification des réseaux enterrés et de respect de la réglementation dite DT-DICT est encore trop souvent à l’origine des affaissements ou des ruptures des réseaux (voir fiche pathologie n°2).
De manière non exhaustive :
- les travaux encore souvent effectués sans possibilité d’analyse préalable de la localisation des réseaux existants, ou fondés sur des données de localisation non caractérisées, non validées et non garanties ;
- l’absence ou insuffisance d’investigations complémentaires avant l’attribution du marché de travaux ;
- l’insuffisance d’informations et de préparation du chantier liée au contexte d’urgence ou à des périodes de préparation trop courtes…
La déstabilisation des terrains
Lors de chantier de terrassement, un rabattement de nappe par pompage est souvent nécessaire pour permettre une réalisation des travaux au sec. Le rabattement de nappe modifie les caractéristiques du sol (poids déjaugé) et peut entraîner un affaissement des bâtiments avoisinants. De plus, les matériaux fins du sol peuvent également être entraînés lors du pompage.
L’absence de diagnostic structure des ouvrages fragiles est à l’origine de prises de risques conduisant le plus souvent à des fissurations excessives des avoisinants ou à des effondrements.
L’absence d’études de sol ou l’insuffisance de ces études comprenant l’ensemble de la ZIG (versant, avoisinants) peut conduire à une méconnaissance du risque de glissements de terrain sur les propriétés mitoyennes.
Une mauvaise analyse de l’hydrogéologie du site et une mauvaise gestion de l’eau en fond de fouille sont également à l’origine de nombreux dommages de déstabilisations des voiles de soutènement de la fouille et de déstabilisation des avoisinants : immeubles, voiries, réseaux enterrés.
Les bonnes pratiques
- La connaissance des terrains en place et des nappes est nécessaire à la gestion des risques pris lors de terrassement aux abords d’immeubles mitoyens.
- Les études de sols doivent comporter des essais in situ et de laboratoire suffisants en nature et en nombre. Le géotechnicien doit être associé à la maîtrise d’oeuvre en amont de projet et tout au long de celui-ci. Les dispositions de la norme NF P 94‑500 de novembre 2013 relatives à l’enchaînement des missions géotechniques doivent être respectées.
- Les études de sols doivent comporter des essais in situ et de laboratoire suffisants en nature et en nombre. Le géotechnicien doit être associé à la maîtrise d’oeuvre en amont de projet et tout au long de celui-ci. Les dispositions de la norme NF P 94‑500 de novembre 2013 relatives à l’enchaînement des missions géotechniques doivent être respectées.
- Une instrumentation des avoisinants avant les premiers terrassements est fortement recommandée en termes de déplacements, déformations, sensibilité aux vibrations… Elle doit s’accompagner de la définition de :
> seuils de vigilance et d’alerte et des dispositions à prendre dans ce cas ;
> seuils d’arrêt.
Ces seuils sont à définir entre les multiples intervenants ainsi que les procédures d’intervention en cas de dépassement de ces derniers. Cela correspond à l’application de la méthode observationnelle. - Une mission AV du Bureau de Contrôle est fortement recommandée.
- Dans le cas de travaux atteignant des terrains en place (talus, versant) la connaissance préalable des sols et de leur hydrologie est indispensable au choix des méthodes d’exécution appropriées.
- Concernant la problématique des réseaux enterrés, il est nécessaire (voir fiche TP n°2) de :
> conserver sur le chantier les récépissés de DICT, les plans, les recommandations spécifiques des exploitants, le PV de réalisation du marquage piquetage ;
> prendre en compte les éléments fournis par le concessionnaire de réseau (réponse du téléservice, plans cotés à une échelle assurant la lisibilité nécessaire) ;
> en cas d’incertitude, prévenir le maître d’ouvrage et lui demander de faire effectuer des investigations complémentaires.
Ce qu'il faut retenir
- La gestion des risques liés aux avoisinants nécessite une prise de conscience de tous les acteurs du projet. L’étude des avoisinants doit débuter dès la phase d’avant-projet avec l’identification des ouvrages concernés. Elle doit être poursuivie en phase PRO avec les diagnostics nécessaires et finalisée en phase EXE avec des suivis et contrôles devant assurer la bonne adéquation entre les hypothèses prises et l’observation.
- Les avoisinants constituent une contrainte forte qui doit être prise en compte par le maître d’ouvrage. Les constructeurs, et plus particulièrement les maîtres d’oeuvre, ont un devoir de conseil auprès du maître d’ouvrage afin que chacune des démarches rappelées précédemment soit réalisée.
- La préparation en amont du chantier conditionne sa réussite, ainsi qu’une bonne coordination entre les différents intervenants tant en conception qu’en exécution.
À consulter
- Recommandations pour la conception, le dimensionnement l’exécution et le contrôle de la technique des voiles par passes, CFMS, 6 octobre 2023.
- Norme NF P 94‑500, Norme des missions géotechniques de novembre 2013.
- Guide pratique sur les travaux à proximité des réseaux réalisé conjointement par la Fédération Française du Bâtiment (FFB), la Fédération Nationale des Travaux Publics (FNTP), l’Organisme Professionnel de Prévention du Bâtiment et des Travaux Publics (OPPBTP) et la SGAM btp assurances (comprenant SMABTP, CAM BTP et L’Auxiliaire.
- Guide STRRES « Réparation et renforcement des fondations ».
Télécharger la fiche pathologie TP Désordres sur les avoisinants